la revue fiscale du patrimoine

ENTREPRISE FAMILIALE 56 séparé de biens, s’appliquent lorsque ceux-ci constituent des propres : l’ameublissement peut être envisagé avec les mêmes précautions. À défaut de modification de la nature de ces biens, la donation sera réalisée par le seul époux propriétaire sans que le consentement de son conjoint ne soit requis (C. civ. , art. 1428) . En cas de risque que les actes successifs (changement de ré- gime puis libéralité) soient perçus comme réalisés dans un but principalement fiscal Note 40 , le régime dotal peut être utilisé si la situation le permet. 18. - La constitution de dot . – La loi autorise les époux communs en biens à donner ensemble un bien personnel de l’un des époux à l’occasion d’une constitution de dot. Les époux sont alors codonateurs tant d’un point de vue civil que d’un point de vue fiscal. L’époux non-propriétaire est redevable d’une indemnité à l’égard de son conjoint (C. civ. , art. 1438, al. 2) . Il est admis que la constitution de dot au profit d’un enfant commun est applicable quel que soit le régime matrimonial des parents Note 41 . ATTENTION Si l’ameublissement de l’entreprise est écarté afin d’éviter de tomber sous le joug de l’article L. 64 A du CGI, la dotation pourra être réalisée, sans risque fiscal, sous réserve que les conditions suivantes soient réunies : - le gratifié est un enfant commun ; - la libéralité doit être faite à un jeune enfant pour faciliter son établis- sement autonome au moment où il prend son indépendance. Dès lors la libéralité ne doit contenir aucune restriction à cette autonomie fraîchement acquise Note 42 : sont à proscrire les clauses d'interdiction d'aliéner et les réserves d’usufruit, les revenus du capital transmis devant bénéficier au donataire ; - il doit s’agir du premier établissement Note 43 . CONSEIL PRATIQUE Si la modification du régime matrimonial est remise à plus tard dans le but d’organiser uniquement la protection du survivant du couple, rien ne semble s’opposer à ce que la convention modificative dispense l’époux codonateur non-propriétaire du paiement de l’indemnité due à son conjoint pour avoir participé à la dot. 2° Les avantages matrimoniaux 19. - Présentation : communauté universelle ne veut pas dire attribu- tion intégrale . – Il est une idée reçue, très largement répandue, à laquelle il faut tordre le cou (et le « coût ») : l’adoption d’une communauté universelle n’implique pas nécessairement l'attribution intégrale au survivant et ses inconvénients fiscaux Note 44 . De façon didactique, on précise aux époux que le régime comporte deux parties indépendantes : -l a composition de la communauté : les biens que l’on décide de mettre en commun ; - la liquidation de cette communauté : ce que deviennent les biens qui en dé- pendent au premier décès. On explique ensuite qu’on est libre de placer le curseur de l’étendue de la communauté et celui des avantages matrimoniaux où on le souhaite indépen- damment l’une des autres. Les biens communs ou devenus communs peuvent faire l’objet de gains de survie. C’est pourquoi le choix des biens apportés à la communauté est également fonction de la protection et de la sécurité que l’on souhaite donner au survivant du couple. 20. - Renvoi . – Il n’est pas utile de détailler et d’analyser les différents avan- tages matrimoniaux puisque cela a déjà été bien fait, dans de précédents dos- siers de la revue, par des plumes expertes Note 45 . Le Code civil prévoit succes- sivement trois types de clause permettant de déroger au principe selon lequel, à sa dissolution, la communauté se partage également en nature et en valeur : - la clause de prélèvement moyennant indemnités dite « clause commer- ciale » Note 46 (C. civ. , art. 1511 et s. ) ; - la clause de préciput (C. civ. , art. 1515 et s. ) ; - la stipulation de partage inégal (C. civ. , art. 1520 et s. ) . Nous nous contenterons de brefs commentaires sur le cumul des facultés de prélèvement (a) , sur la fiscalité applicable à ces avantages (b) , sur la reprise des apports (c) et sur l’attribution intégrale de la communauté universelle (d) . a) Le cumul de la clause commerciale et de la clause de préciput 21. - L’intérêt du cumul . – La clause de prélèvement moyennant indemni- tés a une ressemblance évidente avec la clause de préciput. La première est d’ailleurs surnommée « préciput à titre onéreux » Note 47 . La différence entre les deux facultés tient en effet principalement au fait que la première ne rompt pas l’égalité en valeur du partage Note 48 alors que la seconde rompt cette égalité tant en nature qu’en valeur. De prime abord, cumuler les facultés permettant au survivant d’acquérir ou de se faire attribuer gratuitement l’entreprise peut paraître sans intérêt. Le conjoint se tournera a priori vers la faculté gratuite. Mais, à l’heure du cantonnement, cette double faculté permet au conjoint, en cas de décès accidentel avant la donation, d’avoir la main et de décider, en fonction des circonstances familiales et de ses besoins, de la solution la plus opportune : conserver l’entreprise tout en permettant aux enfants de recevoir Note 40 V. n° 30. Note 41 JCl. Civil Code, Art. 1438 à 1440, spéc. n° 7. – V. les auteurs et la jurisprudence cités. Note 42 JCl. Civil Code, Art. 1438 à 1440, préc., spéc. n° 4 et 5. Note 43 JCl. Civil Code, Art. 1438 à 1440, préc., spéc. n° 6. Note 44 Une seule transmission au deuxième décès, donc une seule fois l’application de l’abattement en ligne directe et des tranches d’imposition. Note 45 V. not. V. M. Clermon et P. Cénac préc. note 8, spéc. n° 73 et s. – Cl. Brenner, Notion et évaluation des avantages matrimoniaux : Actes prat. strat. patrimoniale 2008, n° 2, dossier 11. – A. Grevet, M. Clermont, Y. Malard, S. Fayat, Le couple et les mutations de droits sociaux : Actes prat. strat. patrimoniale 2012, n° 1, dossier 5, spéc. n° 36 s. Note 46 Dénommée ainsi en pratique car la faculté de prélèvement porte souvent sur l’entreprise exploitée en commun par le couple. Note 47 Fr. Terré et Ph. Simler, note 5, préc., spéc. n° 736. Note 48 Cl. Brenner, préc., spéc. n° 15 et 32 : en cela, elle ne constitue pas un avantage matrimonial, sauf clause d'évaluation dérogatoire de l'indemnité.

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