la revue fiscale du patrimoine

SCI/PATRIMOINE IMMOBILIER 46 ou qu’il s’agisse d’une donation, susceptible de générer des droits de muta- tion à titre gratuit (2°). Dans les deux cas, l’ingénierie patrimoniale consistera à rechercher les moyens de limiter le poids de ces impôts. 1° L’impôt sur la plus-value en cas de vente 22. – La vente d’un immeuble bâti ou non bâti constitue le fait générateur de l’impôt sur la plus-value 52 , la plus-value imposable résultant de la diffé- rence entre le prix de cession et le prix d’acquisition de l’immeuble, dimi- nué d’un abattement pour durée de détention 53 . Certes, il existe un certain nombre d’exonérations, notamment la vente de la résidence principale 54 ou la première cession d’un logement autre que la résidence principale, mais en dehors de ces quelques cas, la question de l’imposition se posera réguliè- rement. La plus-value immobilière est alors imposée à l’impôt sur le revenu au taux de 19 %. Une taxe supplémentaire s’applique en cas de plus-value imposable supérieure à 50 000 €. Le taux s’échelonne de 2 % à 6 % selon le montant de la plus-value réalisée. S’appliqueront ensuite les prélèvements sociaux, CSG (9,9 %), CRDS (0,5 %), prélèvement social (4,5 %), contribution additionnelle « solidarité autonomie » au prélèvement social (0,3 %) et pré- lèvement de solidarité (2 %), soit un taux global de 17,2 %. Il peut alors être tentant de « purger » la plus-value en recourant à une opération de donation avant cession, afin d’échapper à cette taxation souvent considérée par les particuliers comme excessive, pour ne pas dire confiscatoire. Cette pratique, plutôt utilisée dans le cadre d’une cession de titres de société, pourrait égale- ment l’être en matière immobilière 55 . Il faut toutefois se trouver dans l’hypo- thèse où l’idée du propriétaire est d’abord de donner à ses enfants. Il y a donc bien une intention libérale à l’origine de l’opération. Dès lors, et si la volonté du donateur est de transmettre une somme d’argent, il pourra donner l’im- meuble, sachant que cette donation n’est pas imposable sur la plus-value, à charge pour les donataires de vendre cet immeuble pour se voir distribuer le prix. La vente ne générera pas de plus-value imposable, car cette plus-value aura été purgée à l’occasion de la donation. En conséquence, le prix de ces- sion sera équivalent au prix d’acquisition, la donation préalable ayant permis de revaloriser le bien et ainsi de purger la plus-value latente. Bien entendu, l’administration fiscale est particulièrement attentive à ce type d’opération. 23. – Il est vrai que l’inversion de l’ordre des opérations de vente et de donation est purement fiscale, mais l’optimisation fiscale n’est pas, en tant que telle, répréhensible 56 . Le Conseil d’État, lui-même, a reconnu que « l’ha- bileté fiscale » 57 , c’est-à-dire le fait de choisir entre deux solutions conduisant au même résultat, la moins taxée, n’est pas un abus de droit. Par contre, il convient d’être rigoureux dans la réalisation de l’opération, et la donation doit 52 La question de l’imposition sur la plus-value se poserait également en cas d’échange, d’apport en société, d’expropriation, etc. 53 L’exonération sera acquise à partir d’une détention de vingt-deux ans pour la plus-value et de trente ans pour la CSG et autres contributions sociales (BOI-RFPI-PVI-20-20-20180824, n os 60 et 70). 54 CGI, art. 150 U, II, 1°. 55 V. en ce sens le 112e Congrès des notaires de France, op. cit. , n° 4499. 56 V. en ce sens le 112e Congrès des notaires de France, op. cit. , n° 4505. 57 CE, 16 juin 1976, n° 95513 : Rec. CE 1976, p. 313. 58 CE, 30 déc. 2011, n° 330940 : Dr. fisc. 2012, n° 11, comm. 193 59 Il conviendra d’être attentif à l’application de la nouvelle procédure d’abus de droit prévue à l’article L. 64 A du Livre des procédures fiscales, applicable à compter de 2021 (L. n° 2018-1317, 28 déc. 2018 : Defrénois Flash 14 janv. 2019, n° 148r0, p. 1). 60 Comité de l’abus de droit fiscal, Rapport 2018, séance du 9 mars 2018 : CADF/AC n° 1. 61 CGI, art. 779-I pour les enfants et 790 B pour les petits-enfants. 62 CGI, art. 777. 63 L. n° 2006-728, 23 juin 2006, portant réforme des successions et des libéralités. 64 C. civ. , art. 1048 à 1061. 65 Avant la loi du 23 juin 2006, la jurisprudence avait validé le legs de residuo (Cass. 1re civ. , 3 nov. 1958 : JCP 1959, II, 11136, note Voirin). 66 Pour des exemples chiffrés, on pourra se reporter au 112e Congrès des notaires de France, op. cit. , n° 4600. 67 C. civ. , art. 1075-1. bien précéder la cession, peu importe d’ailleurs le délai entre la donation et la cession 58 . En d’autres termes, la donation doit être réelle et non pas fic- tive, c’est-à-dire qu’elle n’aura pas un but exclusivement fiscal. La donation poursuit d’abord un objectif patrimonial et développe donc des effets civils et patrimoniaux. À défaut, l’administration fiscale pourrait contester l’opération sur le fondement de la simulation en considérant qu’il s’agit d’une donation fictive 59 . Il en irait de même si l’administration fiscale constatait une réappro- priation du prix par le donateur 60 . 2° L’impôt exigible en cas de donation 24. – La transmission du patrimoine immobilier interviendra fréquemment par voie de donation ou donation-partage. L’anticipation, dans la transmission du patrimoine, est un enjeu fiscal majeur puisqu’elle permettra d’en alléger le coût. La fiscalité applicable est connue, consistant en l’application d’un abattement 61 puis, au-delà, d’un barème progressif pour le calcul des droits, qui varie en fonction du lien de parenté entre le donateur et le donataire 62 . Mais d’autres stratégies, plus élaborées, vont permettre de réduire le poids des droits de mutation à titre gratuit. En effet, la loi du 23 juin 2006 63 a ouvert la possibilité de consentir des libéralités graduelles et résiduelles 64 . Dans les deux cas, une double transmission est prévue en faveur du premier gratifié d’abord, puis d’un second. La différence s’apprécie au décès du premier gra- tifié. Dans le cas d’une libéralité graduelle, c’est l’objet de la donation initiale qui est transmis au second gratifié, alors que dans le cas d’une libéralité résiduelle, c’est ce qui en subsistera 65 . La fiscalité des libéralités graduelles et résiduelles est concentrée à l’article 784 C du Code général des impôts. Lors de la transmission initiale, le donataire institué en premier est redevable des droits de mutation à titre gratuit sur le bien donné dans les conditions de droit commun. Le donataire institué en second n’est redevable d’aucun droit. Au décès du premier donataire, le bien donné est taxé d’après le degré de parenté existant entre le donateur et le second donataire. Le régime fiscal applicable et la valeur imposable des biens transmis au second donataire sont déterminés en se plaçant à la date du décès du premier gratifié. Les droits acquittés par le premier donataire sont imputés sur les droits dus sur les mêmes biens par le second donataire. Cette règle fiscale se révèle donc particulièrement avantageuse, car elle permettra de réaliser de substantielles économies 66 . 25. – Mais la loi du 23 juin 2006 a également ouvert la possibilité de réa- liser des donations-partages transgénérationnelles 67 . « La donation-partage transgénérationnelle est le vecteur favorisant la transmission du patrimoine et plus particulièrement de la propriété immobilière aux générations les plus

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