la revue fiscale du patrimoine
41 1. – L’immeuble est le premier élément constitutif du patrimoine des Fran- çais, souvent même le seul élément. C’est leur premier choix lorsqu’il s’agit d’arbitrer la composition de leur patrimoine car, être propriétaire de son lo- gement, c’est tout à la fois investir pour soi, capitaliser, mais également se projeter dans l’avenir en ayant la volonté de transmettre un patrimoine à ses proches, et en particulier à ses enfants 1 . Pour les propriétaires de patrimoines plus importants, l’immeuble est un choix de diversification, fondement de la gestion de patrimoine, un actif au rendement assuré, parfois source d’écono- mie d’impôt. Mais, dans un cas comme dans l’autre, on peut parler d’ingénie- rie, ou d’optimisation, car le choix initial, volonté d’être propriétaire, ou acqui- sition d’un élément d’actif patrimonial pour investir, manifeste une démarche volontariste et pratique où l’utile le dispute au rendement. 2. – Cependant, le patrimoine immobilier n’est pas le plus favorisé au- jourd’hui. Considéré comme une source d’immobilisme économique, l’im- meuble fait l’objet d’un acharnement fiscal qui se veut dissuasif. Pourquoi supprimer l’impôt sur la fortune (ISF) et maintenir l’impôt sur la fortune im- mobilière (IFI) ? Pourquoi les revenus fonciers sont-ils les revenus les plus taxés ? Ces questions sont posées alors que, d’un autre côté, il a toujours été admis que l’immobilier était le secteur le plus créateur d’emplois. C’est pourquoi il existe, depuis des décennies, des lois fiscales favorisant l’inves- tissement dans l’immobilier locatif, une loi succédant à une autre, au gré des ministres en charge du logement, dans un cycle sans fin. Il faut créer des lo- gements, mais dans le même temps, il ne faut pas que l’épargne des Français s’oriente massivement vers l’immobilier. C’est un difficile équilibre à trouver, alors qu’actuellement, sous l’effet de taux d’emprunts immobiliers histori- quement bas, la volonté d’acquérir un immeuble n’a jamais été aussi forte 2 . 3. – Un tableau se dessine alors, une toile issue de l’impressionnisme, qui nécessite de prendre du recul afin de bien distinguer les contours du patri- NDLR : Contribution issue de L'ingénierie patrimoniale ouvrage collectif sous la direction de S. Lacroix-de Sousa et M. Robineau, hors coll., LexisNexis, juin 2020. 1 F. Devos, L’immeuble est pour nos concitoyens le principal objet de richesse, 112e Congrès des notaires de France, Popos introductifs. 2 Selon les chiffres communs de l’INSEE et des notaires, le nombre de transactions dans l’immobilier ancien s’est établi à 970 000 pour l’année 2018, après une année 2017 où ce nombre était déjà de 968 000. moine immobilier. Ce faisant, on identifie les points sur lesquels l’attention doit porter et l’on s’oriente alors, très naturellement, vers l’ingénierie de ce patrimoine particulier qui s’articule autour de la propriété du patrimoine im- mobilier (I), où l’on s’interroge sur les modalités d’acquisition et de conser- vation de l’immeuble, et autour de l’imposition du patrimoine immobilier (II), car l’immeuble est un enjeu fiscal, qu’il s’agisse de la détention ou de la transmission de l’immeuble. I. – La propriété du patrimoine immobilier 4. – L’achat d’un bien immobilier est un acte d’investissement, une ca- pitalisation à long terme. Il convient donc de se projeter dans l’avenir afin d’optimiser la détention et l’appropriation de l’immeuble. Qu’il s’agisse d’un achat utile, pour se loger, ou d’une volonté de rentabiliser l’achat d’un bien immobilier, la question des modalités d’acquisition se posera ainsi immédia- tement (A). Mais lorsque cet achat se fait en vue d’occuper l’immeuble, l’in- génierie patrimoniale trouvera encore à s’appliquer s’agissant des modalités de conservation de l’immeuble par l’un des propriétaires (B). A. – Les modalités d’acquisition de l’immeuble 5. – Lorsque l’on acquiert un immeuble, des situations simples se présentent. Il en va ainsi d’un couple marié sous le régime de la communauté d’acquêts, si ce n’est l’éventuelle question de l’emploi ou du remploi de fonds propres. En revanche, pour des époux séparés de biens ou des concubins, pacsés ou non, la question des quotités d’acquisition doit être gérée avec prudence et anticipation (1°). Mais si l’on souhaite écarter le régime de l’indivision, qui peut être source de blocage, la détention de l’immeuble à travers une société civile immobilière pourra être envisagée (2°). L’ingénierie du patrimoine immobilier Luc VILLET Notaire, Docteur en droit Enseignant à l’Université d’Orléans © Droits réservés
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